Totus

Notes du chapitre 7 de l'ouvrage
Le Pouvoir pâle, de S.Thion (1969)

 

1. Certaines régions du Nord-Transvaal ont connu, dans les dernières années, des périodes de famine sur lesquelles les autorités sont restées peu loquaces. La sous-nutrition et la malnutrition sont le lot courant. Les organismes privés sont de beaucoup les plus actifs pour tenter d'y porter remède (mais la charité n'est pas un facteur structurel). Quant à la mortalité infantile, elle était, en 1962, de 2,8% des naissances pour les Européens, 5,6% pour les Indiens et 11,9% pour les Métis. (Survey, 1963: p.246.) Il n'y a pas de statistiques pour les Africains mais on esrime qu'elle varie entre 10 et 40% selon les régions. (Survey, 1962: p.201.)


2. Mais, comme tout ce qui touche au monde des Blancs, l'insécurité transparaît "Autrefois, quand on faisait une prière pour la pluie aux Amadlozi [esprits]-- dit un vieil Africain -- la pluie venait dans l'aprés-midi. Maintenant on prie le Dieu, la pluie vient un mois plus tard; juste quand elle veut bien venir." (Hellmann, 1948: p. 102.) Pour ceux qui verront là, à tort ou à raison, l'expression d'une superstition "primitive", on peut rappeler que la campagne électorale nationaliste de 1924 imputait au gouvernement Smuts la responsabilité de la sécheresse: "Le premier geste du général Hertzog, en tant que Premier ministre, fut d'ordonner une journée nationale de prières pour la pluie. La pluie tomba." (Gluckman 1956: p. 38.) La seule conclusion possible semble être que la superstition est plus efficace quand elle est européenne.


3. Pour le traditionaliste africain l'homme blanc n'est pas tout à fait un homme; mais nous ne croyons pas qu'il y ait là un parallèle avec la notion de "créature" telle qu'elle ressortait de l'idéologie boer et afrikaner. L'homme blanc n'est pas inférieur par essence: simplement, il ne sait pas vivre, il ne connaît pas les bonnes manières et ce qu'il faut pour qu'un homme, arrivant à l'âge mûr, puisse être considéré comme accompli. La difference esr donc perçue comme sociologique et non comme ontologique.


4. Il faut ici se remémorer l'histoire de John Mvalo qui est un Rouge typique (cf. p. 132-134).


5. L'indication nous est donnée par A. Vilikazi qui rapporte leur désignation en zoulou: amagxagxa. (The Reserve from within, dans les Proceedings...) Reader (1966) qui a travaillé dans le même district n'en fait pas mention.


6. A un fonctionnaire qui critiquait l'excès de bétail, un vieux Zoulou répondait: "Vous avez tort. Ce n'est pas que nous ayons trop de bétail sur nos terres, c'est que nous avons trop peu de terre pour notre bétail." (Gluckman, 1958: p. 67.)


7. Mais, dans ce contexte de grande pauvreté, sinon de misère, la solidarite des parents peut être une charge très lourde qui la rend peu désirable.


8. La culture traditionnelle et l'usage régulier des langues africaines contribuent à maintenir le sentiment d'appartenance. La littérature qui fleurissait aux temps des royaumes combattants a perdu de sa vigueur. Mais elle reste diffusée encore largement: poèmes de toute sorte, épopées, rédts versifiés des bardes ambulants, musique et danse. Pour une grande part cette littérature est récupérée par les lettrés, et il existe aujourd'hui un courant de renouveau littéraire en sotho et en zoulou. Les milieux ruraux semblent connaître encore bien les ceuvres léguées par la tradition orale.


9. L'absence de cet enracinement justifie le dédain qui s'affiche souvent contre les Métis. (La réalité de ce sentiment est beaucoup plus complexe.) Ceci montre seulement que le tribal est un langage doué d'une efficacité certaine pour transcrire une situation actuelle.


10. Il ne faut pas oublier que dans certaines Réserves existe le droit de propriété individuel. Diverses mesures administratives étendent actuellement son champ d'application.


11. Moyenne donne dans ce contexte une image fausse. Le terme de middle class se traduit souvent par bourgeoisie; c'est bien à cette expression que nous arriverons, mais l'introduction de ce concept ne pourra être justifiée que plus loin (cf. p. 266).


12. Il faudrait pouvoir étudier systématiquement les techniques d'interférence administrative: elles jouent surtout au moment de la succession qui n'est pas réglée strictement par la coutume. S'il y a affrontement de plusieurs candidats le jeu de l'administration est facilité. Il peut arriver que la tribu (ou la fraction) soit capable de régler, de facon interne, le conflit successoral. Le but de l'administration est alors de chercher à susciter un leader qui, refusant d'entériner la succession, tente de provoquer une opposition et des troubles à la faveur desquels l'administrateur ou le juge pourront imposer leur arbitrage. Les résultats sont, dans tous les cas, assez aléatoires.


13. L'affaire du Sekhukhuneland (région aride du Transvaal oriental) débute en 1954 après que le chef Moroamoche et la grande tribu bapedi aient rejeté la proposition de former une autorité bantoue et celle d'appliquer la loi sur l'Education bantoue. Diverses manoeuvres sont alors entreprises par C.W.Prinsloo, haut responsable au ministère des Affaires indigènes: subversion, corruption, offre de bus, d'écoles, d'un hôpital, exil de plusieurs membres du conseil tribal, etc. En juillet 1957 une pétition de 30000 signatures demande le retour des exilés. Le ministère crée une Autorité bantoue bapedi qui doit ensuite être supprimée faute de pouvoir fonctionner. Moroamoche est déposé, l'état d'urgence décrété; en mars 1958 la Cour suprême donne raison à Moroamoche, qui n'en est pas moins exilé manu militari au Transkei .

Toute tentative pour trouver des chefs de remplacement ayant échoué, d'importants renforts sont amenés sur place; la police organise alors une campagne d'intimidation terroriste. En mai, le territoire est tout entier submergé par la violence, les incendies et les meurtres. Prinsloo accuse les Bapedi de vouloir créer un "empire de la sagaie". La résistance est enfin ecrasée et plusieurs centaines d'Africains sont lourdement condamnés par les tribunaux (Cf. Fairbairn).


14. Ce type de structure évoque celui de la période esclavagiste des plantations dans le South cotonnier des Etats-Unis, ou au Brésil. une étude comparative serait sans doute fructueuse.


15. Ce que l'on appelle ville est à proprement parler la location (naturelle dorpe, le "village indigène" en afrikaans), c'est-à-dire une zone d'habitat située dans la banlieue de la ville proprement dite, cette dernière étant entièrement réservée aux Européens, et à leurs domestiques. L'emplacement et les limites des locations sont maintenant définis, pour chaque cas, par un décret gouvernemental.


16. Cf. Hellmann, 1948: p. 31-53; et Xhosa in Town, passim.


17Å Il faut rappeler ici que la bière, jusqu'à ces dernières années, était prohibée et que le brassage domestique était strictement interdit. La législation s'est assouplie depuis lors.


18Å Pauw suggère, avec toutes les apparences de la raison, que les modèles traditionnels de comportement ont un vif attrait émotionnel dans les situations d'insécurité (p. 196).


19Å Pour une formulation psychologique, voir de Ridder (enquête fondée sur l'emploi du T.A.T.).


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